A l’occasion de la clôture de la Paris Dub Session par One-One-Six au Glazart le 23 septembre 2016, on a  fait la rencontre de Mahom Dub qui a accepté d’en confier un peu plus sur son travail.

Au sujet de la soirée Music to Rock the Nation, tu disais que c’était un défi pour toi ?

Antoine : Ouais c’était exactement un défi, parce qu’en fait, pour tout te dire, la veille on jouait à Avignon, il était tard, on a terminé très tôt, et le lendemain on savait qu’on était à Paris, la capitale, qu’on jouait à 14 heures 15 et que les portes du festival ouvraient à 14 heures. Et du coup, dans le train on s’est dit, on va faire un set de bourrin, dans notre tête on va faire comme s’il était 2 heures du mat, en mode grosse session machin, les gens ils sont chauds, ils ont envie de danser. Sauf que du coup c’était le début du festival et nous on s’est mis dans cette optique-là, on a été accueillis tellement bien par Music to Rock the Nation qu’à 14 heures pour nous il était 2 heures du matin. Et il y avait de la pluie, ils ont mis des bâches, c’était vraiment une chouette expérience.

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Crédits photos : © Morgane Dodon-Boyer

Pour toi, la soirée, vous êtes contents du public ?

Joris : Ce soir ? Excellent. Moi je trouvais ça trop cool après voilà, petit souci technique vis-à-vis de la salle, enfin plutôt du voisinage.

Oui ça c’est un sujet récurrent au Glazart de toute façon.

Joris : C’est carrément récurrent, que ce soit Paris, ici, ailleurs, le problème arrive souvent. Mais par contre, on a aimé parce que ça nous a mis face à une difficulté le fait de ne pas avoir de micro. Et on est allés chercher des trucs qu’on n’était jamais allés chercher. Et je pense qu’on a appris ce soir et qu’on va pouvoir s’en servir pour les prochaines fois où on n’a pas de micro. Ça va nous enrichir.

Vous retrouvez régulièrement le même public en soirée ? Il vous semble fidèle ?

Antoine : Le public de Paris, au Glazart, parce qu’en fait à Paris, on a joué qu’au Glazart, c’est la deuxième fois qu’on joue à Paris. Les gens sont motivés du début à la fin, qu’il soit 2 heures, 5 heures du matin. Je sais pas comment ils font mais ils sont motivés, et du coup quand on voit danser des gens devant nous on est obligés de danser. Donc pour moi Paris c’est cool parce qu’ils ont vraiment cette énergie-là. Ce soir, ils en avaient beaucoup de l’énergie malgré ces problèmes techniques, ils étaient là pour la danse. Ils étaient là pour l’énergie et c’était cool.

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Crédits photos : © Morgane Dodon-Boyer

Vous avez surtout utilisé les samples de « Skankin’ Cat« , c’est un album où vous avez mis pas mal de paroles assez engagées en fait, sur l’écologie, sur le système mondial, sur la situation actuelle etc. Pour vous, le Dub c’est une manière de politiser la musique ?

Joris : Pas de la politiser parce que je pense qu’on sera d’accord là-dessus avec Antoine, on a un message à donner clairement, on fait pas ça dans le vent. On dira jamais à quelqu’un vote-ci, vote-ça, pense-ci, pense-ça. Nous on pense ça, si tu veux, tu peux adhérer avec nous, enfin adhérer, c’est relatif. En tout cas on va laisser la possibilité aux gens d’interpréter ce qu’ils ont envie d’interpréter aussi et pour nous c’est vraiment important d’être neutres, de donner de l’amour, de donner de la joie, d’exprimer notre engagement à nous.

Est-ce que pour vous c’est une révolution pacifique le Dub ?

Antoine : C’est une expression pacifique de la vie, de l’amour, des énergies. Enfin ce que nous, Joris et moi, avons envie de diffuser, ce sont des messages positifs, des messages qui donnent envie d’avancer. Des messages qui donnent envie de se questionner, de dire pourquoi on est sur Terre, pourquoi on avance, pourquoi il y a des problèmes, pourquoi il faut aller de l’avant en tout cas. Mais c’est pas donner une direction et dire il faut aller dans cette direction-là. On veut pas cloisonner les gens, leur dire ce qu’il faut qu’ils fassent. C’est plus dire, nous, notre état des lieux il est là, on pense ça, on défend ça. Prends-le, et avec ta conscience fais-en ce que t’en veux. Du coup on espère qu’ils vont méditer là-dessus et avancer dans un sens pour la planète. Mais ça va pas être un sens pour nous, ça va être un sens pour la collectivité. C’est plus dans cet esprit-là de partage.

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Crédits photos : © Morgane Dodon-Boyer

Vous avez ressenti la réception du public vis-à-vis de ce message que vous voulez transmettre, à votre live en Belgique ?

Joris : On essaye vraiment de le communiquer à chaque live et ça se fait pas dans la révolution. Grâce à tes questions, je me dis qu’on n’est pas des rebelles, on n’est pas des contestataires, on est des passionnés d’amour et on veut le transmettre, dire ce que nous on pense, mais on n’a pas de drapeau tu vois.

Antoine : Pour rebondir sur ta question, que ça soit en Belgique, en France, en Croatie, en Espagne, en Ukraine, en Italie, en Roumanie, en Suisse, en Allemagne, au Paraguay, au Guatemala, au Japon, enfin voilà…

Ça vous fait quoi d’être un des plus grands noms du Dub français et de l’Europe ?

Joris : Pour nous on se rend pas compte qu’on est un nom du Dub français.

Enfin vous êtes à côté de Panda Dub, de Brain Damage, vous résonnez quand même.

Joris : Bah ouais on est contents mais on s’en rend pas compte, on vit le truc. Mais tant mieux si les gens nous kiffent on est content. Mais je sais pas, c’est pas ce qui nous fait lever en nous disant qu’on est connus. On s’en fout. On sait juste qu’on a une influence musicale, on l’utilise et elle nous rend heureux en tant qu’influence musicale. On fait attention à ce qu’elle dépasse pas ces cloisons-là, et après ma vie à côté avec Antoine, mon pote c’est encore autre chose, avoir une interview avec toi c’est encore un autre délire, rencontrer des gens ce soir c’est encore autre chose. Ce qui est à Mahom appartient à Mahom tu vois, tant mieux pour Mahom.

Et c’est quoi votre recette pour nous faire skanker ?

(Sifflements, rires)

Joris : Alors la recette, Micheline tu nous fais la recette ?

Antoine : Alors Micheline, la recette c’est pas compliqué : tu prends un skank.

Joris : Tu prends le skank.

Antoine : Un truc qui frétille, un truc qui te fait saliver les papilles comme on dit quoi. Et après t’y saupoudres une petite mélodie par-dessus, qui va te chauffer les oreilles, mais pas que les oreilles. Et qui va te gratter tous les poils du torse… Et là quand t’es au torse, tu mets la basse, et là tu descends dans le bassin parce que tout est dans le bassin, tout est dans le groove du bassin, tu rajoutes le kick qui te donne une énergie, et tu saupoudres d’amour, de joie, de partage, et là tu as une recette de Dub qui te fait kiffer autant sur scène que j’espère dans le public.

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Crédits photos : © Morgane Dodon-Boyer

Vous avez quelque chose d’assez coloré en fait, une musique organique et métaphysique dans votre Dub, avec les paroles dans cette importance du corps que tu viens de nous décrire, l’importance de l’écologie, de l’environnement, des relations sociales… Ça vous vient comment ? Quelles sont vos inspirations pour y parvenir ? Au final, vous faites une musique électronique qui implique vraiment la parole.

Joris : Moi ça me vient du fait tout simplement que j’ai toujours été très sensible et très touché par ce que je voyais autour de moi. Ce matin je me suis levé et j’ai vu une vidéo d’un éléphant (Rires) Tu l’as vue ? Bref. Un éléphant qui a été pris… Je sais même pas si c’était une fiction. Il y a une part de vérité mais enfin c’est un éléphant qui a été pris dans la jungle en Afrique et en gros ça a été un éléphant de cirque qui a badé toute sa vie, et à la fin l’éléphant se rebelle contre ses tyrans, ses bourreaux. Et il meurt avec 86 ou 87 balles face à des caméras, le plus pathétique, c’est que c’est une femelle éléphant qui avait encore l’espèce de plastro qu’on lui avait mis sur la tête. J’ai vu cette vidéo, ça dure 1’30 j’en ai pleuré. Et j’ai toujours eu cette sensibilité énorme concernant les choses qui sont de la nature parce qu’en fait quand je la vois se détruire ça me fait mal, profondément. C’est quelque chose qui est comme une douleur. Que t’as quand tu tombes, quand tu te fais mal, quand tu te coupes quand tu tombes, quand tu brûles. Quand je vois ça, que je le voie dans une réalité ou que je le voie dans la réalité, quand j’arrive à Paris et que je vois toute cette pollution, il y a toujours un espace de mon cerveau et de mon cœur qui s’en veut, et qui se sent coupable et responsable. Et ma part de ce qui va me permettre d’essayer d’avoir une part de bien-être dans cette vie c’est de le dire et de dire que ça me fait souffrir de voir ça autour de moi. Et donc du coup dans Mahom il y a une part de ça parce que moi ça me fait souffrir.

Tu as quelque chose à ajouter ?

Antoine : Je partage ce que dit Joris, et du coup dans Mahom, dans le fonctionnement, c’est vraiment ces choses qui nous touchent personnellement, individuellement en tant que Joris et Antoine. C’est vraiment des choses, comme tu disais, viscérales, des choses qui viennent du corps, qui viennent du cœur. Qui nous donnent envie de les exprimer et d’avancer. Et du coup je rebondis sur la question d’avant. C’est cette chance d’être là où on est, avec Mahom, et de pouvoir l’exprimer aux gens. Au fond, dans la musique, même s’il n’y a pas de paroles, peut-être que si les gens entendent la musique il y en a une qui va comprendre le message. Mais cette personne elle va avancer et se dire OK il y a cet état des lieux et il faut avancer. Et moi c’est ça qui me fait avancer, c’est de me dire que de pouvoir exprimer mon opinion, mes envies, mes peines, mes joies, que du coup ça puisse ouvrir l’esprit et au questionnement. On en revient à la question d’avant, c’est qu’on veut pas imposer les choses, on veut juste faire un état des lieux de notre cœur et de notre corps. De ce qu’il se passe entre les humains et la nature, de pouvoir dire merde, il n’y q qu’une planète, on est je ne sais combien de milliards de personnes sur Terre, et Mars c’est pas demain qu’on va y aller même si la NASA nous dit qu’on va y aller : il faut trouver des solutions !

Tu parles d’avancer, votre projet avance depuis plusieurs années maintenant, là vous avez sorti votre 7e album, Matthias vous pensez retravailler avec lui sur des concerts des projets, ou pour lui l’aventure elle est fermée disons pour une durée ?

Joris : Pour l’instant effectivement ça fait longtemps, mais encore une fois Big Up à Matthias qui a fait naître le projet. Il ne fait plus partie du projet pour des raisons qui lui sont personnelles, après voilà c’est la vie. Maintenant on avance avec Antoine, on est absolument pas fermés aux rencontres, au contraire on adore ça. Pour le moment Mahom c’est Antoine et Joris, s’il y a quelqu’un qui se rajoute ça sera peut-être pas Mahom. Tu vois ce que je veux dire, ça sera peut-être un autre projet. Je pense qu’on n’a pas encore assez creusé le projet de Mahom pour intégrer une personne. On est musiciens et on va vraiment faire l’effort d’aller fouiller au maximum ce qu’on est, ce que je suis et ce qu’Antoine est. Parce que c’est une introspection de faire de la musique vraiment. On va continuer à fouiller et quand on arrivera à certaines limites, peut-être qu’on se posera certaines questions de savoir s’il nous faut un bassiste, un chanteur, un mélodica, un scratcheur j’en sais rien, tout est possible, un violoncelle bref. Pour l’instant, Mahom c’est Antoine et Joris et bah va falloir faire avec les mecs ! (Rires)

Pour l’instant on est très contents, on attend la suite ! Aujourd’hui il y avait l’un de vos partenaires musicaux qui était présent, je pense à Mayd Hubb, il y aussi eu Brain Damage, Tetra Hydro K etc. Est-ce que vous avez d’autres partenariats en vue avec des artistes aux styles plus différents, je pense à Secret Vibes par exemple, ou à des groupes tout juste naissants, peut-être que vous connaissez Green is The Colour avec Baba Ruben ?

Antoine : Pour tout te dire, pour l’instant, on est en train de travailler sur un nouvel album avec juste Mahom, qui va sortir en 2017, on espère début 2017, on arrive à un truc. On y travaille, ça va être chez ODG en téléchargment gratuit. On va essayer de faire du 100% Mahom, sauf que Mahom ça travaille avec des gens, du coup il va y avoir des feats, il va y avoir des choses, des invités, cette fois-ci il n’y aura pas de remixes, Inch’allah hein parce qu’on sait pas encore ce qui va être fait. Pour l’instant on a mis un standby sur les collaborations avec d’autres artistes. En fait, nous ce qu’on aime bien dans le Dub, et dans d’autres collaborations musicales, c’est les échanges et les partages. Et du coup oui il va y en avoir. Là il y a le dernier Skank Lab qui va sortir, donc c’était Mahom et Iron Dubz, qui nous a fait un redim, on a fait un remix il a fait un remix du redim. On adore bosser avec des gens comme les Brain less, des Kandid, des Ali Shankara, des Panda, des Mayd Hubb. N’importe qui, ça je te parle des gens du Dub. Mais on aime aussi bien faire avec des gens qui viennent du jazz, de la musique contemporaine, de plein de choses : on n’arrêtera pas là-dedans. Pour l’instant on est focalisés sur l’album parce que ça demande beaucoup d’énergie, beaucoup beaucoup de temps. Là on est bloqués jusqu’à février-avril 2017 mais après on va reprendre, on a envie de faire des trucs, on a même la folie d’avoir envie de faire des lives avec d’autres dubmakers avec d’autres instrumentistes : c’est Mahom avec un autre truc, on a fait BassTrooper avec Ashkabad, on a envie de refaire un EP avec Ashkabad sur le nom de BassTrooper, on a envie de faire évoluer ce projet, avant tout c’est de la rencontre musicale et humaine : là maintenant faut laisser le temps au temps pour qu’on puisse avancer. Parce qu’on est pas des machines. Il va y en avoir, c’est toujours dans un coin de notre tête.

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Crédits photos : © Morgane Dodon-Boyer

Vous parlez de refaire un album, ça compte aussi dans le système du Dub, il y a le retour et l’omniprésence du vinyle, l’importance de la qualité sonore et du craquement en fait, et quelles sont les difficultés pour mettre en place ce support-là. Car même s’il y a un retour ça reste une matière assez chère qui implique des soucis de transmission et de communication culturelle, parce qu’aujourd’hui, avec la dématérialisation de la musique, comment vous arrivez à entretenir une rentabilité économique avec ce support de musique ?

Joris : J’ajouterai juste qu’il y a aussi un souci de transport parce que c’est très matériel, c’est tout bête, mais il faut le dire : un vinyle c’est quand même celui qui pèse le plus lourd parmi tous les supports entre le CD et tout ce qu’il peut y avoir. Pour répondre à ta question, en fait nous, notre avantage, c’est qu’on produit le Dub, du coup on s’en soucie pas trop de ça. On fait la musique, quand un label nous appelle, on répond présent si le projet nous intéresse, et le label s’occupe de gérer la partie production. Et c’est pas qu’on veut pas mettre notre grain de sel ou quoi que ce soit, c’est juste que, pour le faire comprendre aux gens qui vont écouter ton émission, c’est simplement que, produire le son, c’est déjà un projet énorme. Souvent on nous pose la question aussi  : « mais pourquoi vous avez pas un sound-system en fait » ? C’est juste qu’exprimer notre amour dans des sons concrets, ça nous laisse très peu de temps pour manger bien, avoir une copine, aller au sport, s’amuser un peu avec les copains, voir sa famille. Du coup si on avait en plus le souci de se dire comment on va faire, on veut faire 500 vinyles, qui est-ce qu’on va voir, la SDRM, la SACEM le truc le machin, la paperasse, le mastering… Toutes ces problématiques-là en fait, on les laisse de côté, et grâce aux règles du Dub entre guillemets, heureusement on y touche pas trop. Le label va s’occuper de tout ça, et juste avoir entre guillemets parce qu’on n’est pas dans le monde de l’entreprise, va voir une bande de Mahom et dire « j’aimerais récupérer ce son que vous avez créé, après nous on va négocier le deal entre le producteur et nous ». Et derrière il va s’occuper de nous mais il ne va pas prendre part dans ce système-là, il va nous filer une part des vinyles, d’ailleurs on en a ramené ce soir, ensuite on les vend de la main à la main. Il nous file une part assez minime de celle qu’il a produite, notre système repose sur la promotion, c’est-à-dire simplement qu’on se fait pas d’argent avec les 5% ou 10% de parts de vinyles qu’on nous file. Ça va jsuste nous permettre de penser que les 100% de vinyles vont être diffusés, joués peut-être, en Roumanie, en Allemagne, en Angleterre. Peut-être que la production du vinyle va se diffuser dans un réseau qui est différent de celui d’internet. Et c’est en cela que c’est intéressant, et c’est pour cette raison qu’on y va.

Quelle place prend encore pour vous le système du Do It Yourself dans la mise en place de vos soirées, de vos albums, jusqu’où c’est une politique qui domine encore la musique ?

Antoine : Qu’on soit bien clairs, Mahom n’organise pas de soirées, Mahom n’a pas de sound-system, Mahom ne fait pas la promotion en organisant des soirées. Mahom c’est deux dubmakers qui font du DIY qui font leur son avec leurs ordinateurs, leurs instruments, leurs studios maison. La seule chose qu’on fait pas, c’est le mastering. Nous sur le prochain album on va retourner dans le même studio, Bazal Studio à Clermont-Ferrand Big Up. Ils font un très bon taff parce que nous on sait pas faire, lui il a les machines et surtout il a la connaissance pour le faire. Sinon pour le DIY on fait tout, c’est en mode home studio à la maison, que ça soit à Clermont-Ferrand, Avignon ou Bedigeris. Le DIY c’est la base. Avec Joris on est deux ingé son, on s’est rencontrés en audiovisuel pour faire de la télé, du cinéma, des spectacles. Le Dub c’est deux choses, il y a la composition musicale et après il y a le mixage et après il y a la création avec le mixage où tu viens mettre des basses, enlever des kicks.

Ton mix va être un arrangement que tu vas faire. On prend un malin plaisir en live à refaire des arrangements tout le temps. On a tout qui tourne dans nos machines en permanence donc on fait des arrangements tout le temps. On a nos machines, maintenant si on n’a pas envie de jouer la basse, on enlève la basse. Si on a envie de jouer le kick, on joue le kick, il n’y a pas de règles. Mais du coup c’est nous qui choisissons mais c’est pas écrit. Le DIY c’est important, nous on fait tout à la maison comme je te le disais, à part la question du mastering. C’est donc ultra important pour nous sauf qu’on n’a pas de sound-system et qu’on n’organise pas de soirées. On est que dans la case dubmaker qui fabrique de la musique.

Est-ce que la nouvelle politique concernant les intermittents du spectacle a un impact sur vous en tant qu’artistes ?

(Rires)

Joris : Forcément, on est des intermittents, donc une loi sur les intermittents ça a une influence sur nous. Après, on va être cohérents avec ce qu’on a dit au début : j’ai envie de dire aux gens, renseignez-vous, et allez voir ce qu’est cette loi. Regardez ce qu’elle était avant, regardez ce qu’elle est devenue. Moi personnellement je pense qu’il y a des points positifs et des points négatifs au changement, mais globalement, c’est quand même une fourberie du gouvernement pour faire des économies. Et c’est tombé pile au bon moment, ils ont décidé ça juste avant le festival d’Avignon, et au festival d’Avignon il y avait toutes les manifestations concernant la Loi Travail, les Nuit Debout, 49.3 fin bref le blabla. Ils ont fait ça parce qu’ils savent que l’été les intermittents partent en vacances, en été il savent que tout est possible et ils peuvent annuler tous les festivals. Ils l’ont fait pour que les intermittents n’annulent pas les spectacles. J’habite Avignon donc je suis en plein dedans. Et en même temps c’était aussi pour construire la paix sociale. La contestation reprend, on n’en parle pas trop dans les médias mais elle reprend, au final c’est juste une fourberie pour donner du grain à moudre au peuple. Mais c’est juste une économie de plus mais enfin empêcher de faire des manifestations cet été, et ça je le répète c’est mon avis, faites-vous votre avis tous autant que vous êtes. Il n’y a pas de justesse, pas de vérité, c’est mon interprétation de ce que j’ai vu.

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Crédits photos : © Morgane Dodon-Boyer

Vous parlez d’Avignon, comment est-ce que la musique et votre domaine le Dub, comment est-ce que vous arrivez à vous relier avec les autres domaines artistiques, le théâtre, le cinéma même s’il est moins représenté à Avignon, les arts du cirque, je pense aux Baladins du Miroir avec le théâtre itinérant ?

Antoine : J’ai envie de dire que par rapport à Mahom, au projet Mahom, il n’y a pas trop de mixité, on va pas aller faire de projet théâtre, danse, avec Mahom. Par contre avec Antoine on a des influences on baigne dans le milieu artistique, on a des clowns, des danseurs. En fait dans le Dub c’est aussi cette mixité culturelle qui va se retrouver : Mahom c’est un album où on va faire du Dub ethnique, du Dub africain, du Dub français, on va faire-ci on va faire-ça. Ça permet de mettre toutes les influences et de mettre tout le monde dans le même panier. Pour pouvoir donner ce que t’as envie de donner. Dans nos pensées et dans nos vies à côté ça s’exprime pas en tant que Mahom mais je sais que nous deux on fait des choses qui font cette mixité et ce mélange. C’est là cette philosophie qu’il n’y a pas de voie pour faire de l’art. Tu peux être maçon et faire de l’art, tu peux être artiste et faire de l’art, tu peux être avocat et faire de l’art. Tout le monde peut faire de l’art et s’exprimer, tant que ton message est fort, et tant que ton message vient de ton cœur, il va être juste. Tant que toi tu vas être juste, les gens vont te percevoir juste. Et du coup cette mixité au niveau du Dub et au niveau de tous les arts du spectacle et du cinéma, c’est là qu’il y a des étincelles, et comment dire des chocs qui font qu’il se passe quelque chose. Ça par contre il ne peut se passer des choses qu’en live quand il y a des choses physiques et émotives.

Ça en revient à votre système de soirées propres au Dub, c’est-à-dire que vous êtes très proches de la performance, tu pars d’une rencontre, c’est un lieu c’est un moment ; avec vos concerts on a toujours la particularité d’avoir un spectacle auquel les gens sont là pour la majorité pour écouter. Les gens ne sont pas venus juste pour s’amuser j’en ai entendu plusieurs dire : « Ouais je suis venu pour Mahom Dub. J’ai envie d’écouter vos samples, de voir ce que ça fait en live. »

Antoine : Là j’ai juste un truc simple à répondre, je pense que le Dub et le projet Mahom fait partie de la grande famille des spectacles vivants. Il y a Mahom en CD, il y Mahom sur internet, il y a Mahom sur ta platine vinyle chez toi, et après il y a Mahom en live, Mahom avec l’énergie de Joris, l’énergie d’Antoine, Mahom avec les basses, Mahom sans les basses, Mahom avec les micros comme ce soir il y a Mahom sans les micros. C’est du spectacle vivant, c’est quelque chose qui se vit quoi. J’ai pas d’autre mot que spectacle vivant, c’est un spectacle interactif. Si moi je suis motivé je vais motiver les gens, si les gens sont motivés je vais motiver les gens. Si Joris est motivé il va me motiver. Tu vois c’est un cercle, c’est une énergie commune qui fait que nous on avance. Que les gens sont dans une énergie et qu’on est dans cette énergie. Ouais en fait j’ai rien d’autre que spectacle vivant à vivre. Avec le moment, avec l’instant, on parle de cette génération avec les téléphones portables, avec internet blabliblabliblabla, déconnectée de la réalité ; quand on est sur scène il y a plus ça, c’est juste le moment présent avec l’amour qu’on peut donner, avec l’amour que les gens peuvent nous donner à travers leurs danses, à travers la réception, qui font que il va se passer quelque chose, une étincelle et on va juste la vivre mais en fait elle est indescriptible. A la radio c’est indescriptible ce qu’il vient de se passer ce soir. Le live, il y a une énergie sur le moment avec ce que les gens ressentent qui me donne envie d’avancer.

Tu parles du projet Mahom parce que tu tends à différencier vous deux et le projet Mahom comme si Mahom était une troisième personne, vous avez d’autres projets en parallèle à deux ou personnellement ?

Joris : Personnellement ma vie c’est kiffer avec mes deux chats, mais vraiment c’est hyper important pour moi. Et faire de l’aikido en ce moment ça me plaît. Et voilà, c’est simple. Sérieusement, on est très normal, j’ai rien de très fou et d’extravagant à te dire mais après c’est l’énergie qu’on y met, pour moi mes deux chats ont toute leur importance dans ma vie, du coup pour moi c’est hyper fou et hyper important quoi, c’est comme si demain je devais voyager sur la Lune tu vois. En dehors de Mahom pour moi c’est ça.

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Crédits photos : © Morgane Dodon-Boyer

On est à Soirées Electroniques, un média qui a maintenant plus de deux ans, qui porte sur les musiques électroniques, et plus largement sur les spectacles vivants qui y sont associés. Ça touche à tous les styles musicaux on va vers les soirées Trance, vers les soirées plus Techno, vers les soirées un peu Drum’N’Bass, on fait des interviews de labels ou d’artistes en montée. Et ça nous intéresse de plus en plus de pouvoir rencontrer des artistes comme vous, de pouvoir présenter des soirées comme celles-ci.

Antoine : Yo c’est Toinou de Mahom, on est à Paris, à la capitale au Glazart. One-One-Six Glazart Plage. Big Up Big Up Big Up aux Soirées électroniques. Big Up pour cette interview, c’était vraiment pertinent et profond de passer ce moment avec vous. C’était vraiment intéressant d’aller fouiller ces questions qui viennent gratter au fond de moi, au fond de mon pote, mais qui du coup peuvent transmettre ce qu’on a envie de dire, juste merci. « Smile is the Key« , une citation de Panda Dub.

Merci à vous, bon rangement, bon courage pour la suite, à très bientôt.

Source : https://www.lofizine.com/2016/10/10/interview-mahom-dub/

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