17 . 07 . 2018
- 16 h 30 : arrivée à l’hôtel
- 17 h 30 : départ pour la ville
- 19 h 30 : pluie torrentielle
- 20 heures : prière bouddhiste
- 21 heures : repas sans le Dragon Bridge
- 22 heures : pluie torrentielle
Une fois à Danang, un chauffeur insiste lourdement pour m’embarquer. Il n’a pas de coffre pour mon sac. Je réussis à refuser alors qu’il empoignait fermement mon bagage. La conseillère de l’agence de voyage m’appelle un taxi. L’auberge est à quatre kilomètres et je suffoque. Nous ne nous comprenons pas avec le réceptionniste, à se demander s’il le fait exprès.
Maintenant que je suis déchargé, je me sers de mes jambes pour rejoindre le centre-ville et me promener dans Danang. Quand la nuit tombe, la ville scintille de toutes parts. La grande roue et les immeubles reflètent dans le fleuve. La vue depuis le port me marque. Plus loin, le Dragon Bridge convoque le regard et se transforme en rai de lumière changeant de couleur. Mon parcours m’amène à temps au temple Ma Cha où je voulais assister à une prière. Tout le monde est agenouillé sur un coussin, face à un Bouddha massif.
Les bonzes mènent le chant qui résonne partout dans les haut-parleurs. A certains moments, ils se lèvent. Mon anorak couvre mes jambes, je suis trempé. Je profite intensément de ce moment qui m’apaise, me transporte, me soulage. J’irai ensuite dans la cour admirer les artefacts et les fleurs. Un moine me croisera, me sourira : je baisserai la tête en signe de réponse. Je traverserai le Dragon Bridge sous lequel je m’assiérai, une galette de légumes à 10.000 VND dans les mains. J’irai jusqu’au bout du ponton bétonné où les amoureux font graver les cadenas de l’affection. Sur le retour, la pluie torrentielle emplira les chaussées et débordera sur les trottoirs. Le tintamarre des voitures, les gouttelettes sur mes verres, l’eau jusqu’aux mollets, les reflets multidirectionnels me feront me sentir vivant.
18 . 07 . 2018
- 8 h 30 : petit-déjeuner
- 9 heures : départ pour la Marble Mountain
- 9 h 30 : arrivée à la Marble Mountain
- 11 h 30 : départ pour Hôi An
- 13 heures : arrivée à l’auberge
- 14 heures : tout du marché
- 15 heures : déjeuner au Morning Glory
- 16 heures : prise des quartiers
- 18 heures : spectacle
- 20 h 30 : dîner au Morning Glory
- 22 h 30 : collation au pub irlandais
Quand je demande le petit-déjeuner, la réceptionniste me rétorque que l’auberge a changé de patron et qu’il n’est pas inclus. Je rebondis grâce à mon souvenir des affiches stipulant que nous avons le droit. De plus, l’application l’annonçait. Je perds du temps en attendant que l’employée parte à la recherche de mon repas. Elle me rapporte un phô dans un sac plastique, de quoi bien démarrer la journée.
Elle se charge de faire l’intermédiaire avec le motocycle appelé par Grab. Je suis surexcité à l’idée de visiter la Marble Moutain que Greg m’a fortement recommandée. Nous filons sur la route longeant la plage. J’ai pris goût à ces virées à l’arrière d’un conducteur.
En bas de l’escalier, je me retrouve plutôt étonné. J’ai quarante-cinq minutes devant moi et je ne comprends pas. Au sommet, je suis supposé atteindre une vue imprenable sur les lieux. L’escalier en pierre fraie un chemin entre les arbres et le vide sur un flanc montagneux. Une fois en haut, ce sont des artefacts et des restes d’édifices religieux. Quelques cavités se disséminent ici et là. Des points d’appui ont été taillés au burin pour prendre de la hauteur dans une cavité. La crainte de manquer le bus vers Hoi An accélère à la fois le temps et le rythme de ma marche. Le conducteur m’a donné son téléphone afin d’être sûr qu’il soit en bas. Je me presse de rejoindre le guichet. Il n’est plus là. Je me sens impuissant. Ce n’était pas la Marble Mountain, classée patrimoine mondial de l’UNESCO. Le voilà qui se gare.
En quittant l’auberge, j’ai manqué d’y oublier mon passeport, car la réceptionniste ne me l’avait pas rendu d’elle-même. Une jeep nous emmène à plusieurs au bus, nous mettons trente minutes à partir, j’arrive à Hôi An avant treize heures.
Mon sens de l’orientation me fait prendre quelques détours avant de trouver le Leo Leo Hostel. Enfin c’est ce que je pense car je suis d’abord entré dans celui d’à côté, Leo Hotel, vide, sans quiconque. J’ai pu m’y rincer le visage. Je me change dans l’arrière-boutique dans le hall de Leo Leo Hostel qui accepte de garder mes affaires avant que je n’aie le droit d’accéder à ma chambre. Étrangement, mon anglais est bien moins accepté par ici, nous éprouvons quelques difficultés à dialoguer. Je ne perds pas de temps et m’en vais vers le guichet de la Vieille ville qui me donnera accès à cinq bâtiments traditionnels.
J’en visite deux gratuitement sur le chemin, dont la maison commune de la congrégation chinoise de Hainan en mémoire de pirates avec une fresque d’idéogrammes.
Les vendeuses parlent français au guichet. Elles m’indiquent la boutique Le Toi pour des vêtements en soie. Il pleut à sauts. La ville portuaire prend rapidement dix à vingt centimètres d’eau sur les voies, il y a beaucoup de touristes et de vélos ici.
Au marché, les paniers de nourriture jonchent le sol. On y trouve des crevettes grises, des palourdes, des poulpes, des calamars. Autour de certains poissons des mouches ont déjà commencé à pulluler.
J’entre au Morning Glory où je suis le dernier client. Le nom fait référence au repas des pauvres gens, à partager. Je suis restauré de l’un des plus fins repas de mon voyage : un plat à base de curry. Il est bientôt seize heures. A dix-huit heures trente, je serai avec Aja à l’Opéra d’Hôi An. Je vais prendre mes quartiers à l’auberge de jeunesse où je partagerai mon repos avec une Coréenne, une Hollandaise et un Australien. Ma voisine de lit est assistante sociale.
Nous sommes accueillis par l’équipe de production du spectacle avec un thé glacé. Durant AO-Show, les acrobates enchaînent les numéros en suivant une odyssée temporelle nous faisant voyager à travers les âges du Vietnam. Ce sont d’abord les conques puis les bambous sur lesquels ils se hissent qu’ils s’ennuient ou évitent. Le tout sur de la musique instrumentale. Tout est rythmé, chaque pas, ou mouvement est mesuré et inscrit dans la trame générale, résonnant dans le déplacement d’autrui. La parole est rare, le geste dit tout.
Il a cessé de pleuvoir. Nous déambulons transis dans la ville en extinction. Les lanternes en papier confèrent un nouvel éclat à la cité qui entre dans une autre dimension. Je l’emmène au Morning Glory où nous patientons. Nous sommes acceptés, en raison du monde qui attend, dans l’autre partie du restaurant.
Il y a de la place sur le balcon. Je suis content de travailler mon anglais avec une américaine. Un Gilgamesh coloré orne l’un de ses bras orangés. Nous irons rejoindre ses camarades de la journée dans un pub irlandais sur l’autre rive du fleuve à deux pas du théâtre.
« It’s a place for white people, dis-je en plaçant inconsciemment mon bras au-dessus de sa chaise.
– Yeah, rit-elle, empreinte de déception. Are you moving back ?
– I am going to take some pictures of the city by night. »
Nous nous séparons relativement tard, je déambulerai à la recherche de souvenirs à photographier, rasséréné par un Irish coffee et de la présence féminine.
19 . 07 . 2018
- 9 h 30 : petit-déjeuner sur le toit
- 11 heures : arrivée à la plage
- 13 heures : la grand-mère me fait monter à bord
- 15 heures : spectacle de danse
- 16 heures : Maison des Artisans
- 17 heures : boutique Le Toi
- 18 heures : massage
- 20 heures : dégustation au marché nocturne
- 20 h 30 : balade en bateau
- 21 heures : Cong Caphé avec les anglaises
- 23 heures : apéro avec Luke et Clémence
Au grenier, la famille gestionnaire de l’auberge a aménagé un coin petit-déjeuner à proximité de leur cuisinette et de leurs espaces de repos, le tout donnant sur un balcon. L’omelette aux légumes réveille le palais, et les confitures maison ont de quoi rivaliser avec les Britanniques. Je vois un café sur le balcon, avec la ville en pleine vie : des ouvriers travaillent sur le chantier d’une maison à l’horizon. Au rez-de-chaussée, je me fais aplatir par le fils de la famille au billard. J’emprunte une serviette et pars pour la plage. Le code de la route du pays me fait trop peur pour y aller à bicyclette. Il me faut une heure pour l’atteindre.
« Hello Sir, 20.000 for the seat.
– I only walk, thanks. »
Plus loin, la place sur le transat est gratuite, le jus de noix de coco y coûte 65.000 VND. Un marchand de journaux, amputé d’une jambe se déplace à l’aide de béquilles en bois. Il connaît Handicap International. Le journal local, publié en anglais, coûte 45.000 VND Il est bien renseigné.
Les rouleaux de la mer sont saisissants. Il n’est pas possible d’avancer très loin, les vagues me recrachant sur le rivage. J’adore cette sensation de perte dans le creux de l’eau, le corps assailli par le sel et l’écume, le squelette attaqué par la puissance de l’eau décuplée par celle du vent. Je m’amuse longuement sur la côte de la mer de Chine. Au ras du sable, l’eau atteint mes mollets. Je m’y allonge la tête sur le sable, et me laisse tranquillement déporter et fluctuer sur une vingtaine de mètres, en longueur. L’eau remplit mes narines.
Quand je retourne sur la route, un chauffeur insiste pour me reconduire. Il va jusqu’à réapparaître au bout de cinq minutes, sur son scooter, me demandant 60.000 VND. Je le reconduis, une femme s’arrête à mes côtés.
« Come on Sir, get on the bike, don’t be afraid.
– I’m okay, thanks.
– For free Sir, don’t be afraid.
– Thanks a lot, where are you from ?
– From here, what about you ?
– France, Paris.
– So beautiful, my daughter lives there, I am a grandmother now.
– How lucky I am. You can let me here don’t worry.
– Have a nice life, Arthur. »
Grâce à mon ticket, j’assiste à un spectacle de danse traditionnelle, très cadré et gracieux. J’irai ensuite à la maison des artisans contempler les créations. Je visite quelques maisons communes de congrégations. Les couleurs de cette ville sont insaisissables. L’ocre, l’orangé, le jaune canari, le rouge et l’azur s’épousent et illuminent toutes les ruelles.
Chez Le Toi, des outils de manufacture annoncent la qualité de l’ouvrage. La conseillère m’emmène dans l’un des espaces suite à un questionnaire. Un costume en soie marron foncé attire mon regard. Je décide de rester raisonnable et choisis deux cravates en soie pure. Trois français sont entrés, ils accompagnent une colonie de vacances. En retournant à l’hôtel, un homme m’attrape par le bras et me sonne de me retourner : mon portefeuilles et mon passeport sont tombés de la poche de l’anorak que j’accroche en ceinture.
Plus loin, je croise les deux britanniques rencontrées en route pour Easy Tiger Hostel. Je leur donne quelques adresses et note leurs numéros, je me dépêche vers l’Institut de soins du corps aux esthéticiennes formées en Union Européenne. Encore plus loin, Clémence fonce sur moi et me prend dans ses bras. Luke négocie l’achat d’une moto pour la suite de leur voyage.
Je ris lorsque je me fais épiler le dos pour contenir la douleur. Les esthéticiennes rient avec moi, il y a du travail. Au vu de mes cicatrices, elles sursautent.
« Is your back ok, Sir ?
– Don’t worry, I’m fine. »
La tête dans l’espace vide du matelas, je pousse avec mon crâne pour me maintenir en place. Ça fait scratch, scractch. Pour cette séance, j’ai demandé à finir par un massage du dos. Elle ont pris confiance en moi. Deux sortent, la plus âgée reste et éteint les lumières. Elle s’allonge sur moi et exerce des pressions. Puis elle appuie de ses pieds sur mes os. Ça fait un bien terrible. C’est le troisième massage de ma vie. A la fin, elle me déplace pour me retourner et m’offre un massage crânien. J’en sors soulagé. Quand je quitte les lieux, un crabe se promène le long de l’entrée. Celle qui m’a accueilli rouvre la porte.
« Sir, don’t swim now !
– Oh, I’ll be in Ha Long Bay on the 23rd, will it be good ?
– Don’t swim until Sunday ! »
Je m’avance vers le marché nocturne où je négocie des sets de table et des baguettes, rubis et émeraude, il y en aura assez pour mes frères et leurs compagnes.
Je m’assieds le temps de goûter à un poulpe rudement épicé. Je me remémore le restaurant napolitain sur la plage, où on en faisait cuire dans le sable. J’ai rendez-vous dans un Cong Caphé avec les Britanniques rencontrées dans le bus vers Phong-Nha-Kê Bang. D’abord, je me paie une balade en pyrogue sur le fleuve pour 100.000 VND, je n’allume pas les chandelles, je suis seul.
Les Britanniques sont calmes et particulièrement bien élevées, un peu timides, surtout très polies et en pleine possession de l’art de la conversation. Luke et Clémence tardèrent à arriver. Je divulguerai de derniers petits conseils de voyage aux Anglaises puis nous nous quittons, elles voulaient se reposer pour le lendemain.
Les amoureux m’invitent sur la terrasse de leur location boire quelques bières et échanger les dernières aventures. Le wwoofing, la mondialisation et la politique feront partie de nos sujets de conversation. Luke me raccompagnera à moto. Nous aurons du mal à démarrer, faute que je ne sache où poser mes pieds. Je ne reconnaîtrai plus la route en arrivant.
« Mec, on a dépassé. Je dois être Alzheimer précoce.
– Mange du poisson.
– Bonne route, Luke.
– On se revoit en France. »
Le moteur vrille, Luke disparaît dans l’obscurité de la ville. La grille est fermée, une fois de plus.
20 . 07 . 2018
- 9 heures : petit-déjeuner sur le toit
- 10 heures : balade dans le quartier
- 10 h 30 : partie de billard
- 13 h 45 : départ du bus
Je profite une dernière fois du toit et des pancakes avec de la confiture. Je pars dans le centre-ville visiter d’autres lieux chargés de l’histoire coloniale. Je me promène dans cette ville jusqu’à l’horaire du bus.
De retour à l’auberge, je récupère le linge récemment lavé, j’ouvre mon sac pour en retirer mon passeport et j’entame une partie de billard avec le fils de la famille. Le bus arrive en plein milieu, je n’aurai pas eu le temps de me faire totalement laminer. En montant dans le bus, je m’embarque pour vingt heures de route afin de rejoindre la capitale.
Engagé pour l’intérêt général depuis l’âge de 15 ans, j’interviens au fil des années dans le cadre de projets associatifs, d’événements culturels et de réseaux internationaux.
Sur le plan professionnel, j’ai exercé plusieurs activités à la sortie de Station F où j’ai travaillé sept mois en 2021, à l’occasion d’un Service Civique.
Sur le plan personnel, j’aime écrire, et je prévois de poursuivre !